Comment empiler les titres ? C'est la question que se posent tous les entraîneurs du monde. Et s'il suffisait de recruter Patrice Evra ? Depuis qu'il a quitté l'AS Monaco en janvier 2006, le « Pat » a remporté au moins un trophée par saison à l’exception de l'exercice 2013 / 2014, son dernier avec la tunique de Manchester United sur les épaules. Une erreur de parcours qu'il s'empresse de corriger cette année avec son nouveau club. Sauf une incroyable hécatombe, la Juventus Turin devrait gagner son quatrième scudetto consécutif. Ce sera le premier pour le natif de Dakar qui a pris part à 19 rencontres de championnat sur les 32 jouées jusqu'à présent. Auteur d'un but et d'une passe décisive en Série A, Evra n'est certainement pas le joueur le plus décisif de son équipe. Il officie notamment dans l'ombre de Carlos Tevez ou Paul Pogba, deux coéquipiers qu'il a déjà côtoyé chez les Red Devils. Difficile alors de valoriser son importance dans la réussite de la Juventus Turin. Et pourtant.
Hommes des grands matchs
Lorsque Patrice Evra joue, son équipe ne perd quasiment jamais. Il n'a participé à aucune des trois rencontres lors desquelles son club a été battu en championnat cette saison. Il était également sur le banc face à l'Olympiakos en phase de poule de la Ligue des Champions ainsi que lors de la demi-finale aller de coupe d'Italie perdue contre la Fiorentina. Seul faux-pas, la défaite concédée devant l'Atlético Madrid en C1.
Mais alors, pourquoi ne dispute-t-il pas plus de matchs ? La faute notamment à une blessure aux ischios-jambiers qui l'a tenu écarté des terrains pendant 5 rencontres entre le 26 octobre et le 22 novembre dernier. Pour comprendre, il faut également observer de près le calendrier de son club. Le 20 février dernier, il ne joue pas contre l'Atalanta Bergame en Série A. Massimiliano Allegri, son entraineur, préfère le préserver pour le huitième de finale aller de Ligue des Champions face au Borussia Dortmund quatre jours plus tard. Rebelote le 14 mars à Palerme avant le retour contre les Allemands. Le cas se représente aussi le 11 avril. Son club affronte Parme, Evra ne rentre pas.
Il est en revanche titulaire en quart de finale aller de la Ligue des Champions face à l'AS Monaco le match suivant. Il devrait de nouveau débuter lors des demi-finales face au Réal Madrid les 5 et 13 mai prochain. L'occasion pour lui d'arracher une cinquième qualification en finale après 2004, 2008- son unique victoire-, 2009 et 2011.
Une constance dont peu de joueurs peuvent se vanter, tout comme de son palmarès. D'autant plus qu'il pourrait également garnir son armoire à trophées d'une coupe d'Italie en fin de saison. La Juventus Turin disputera la finale face à la Lazio Rome le 7 juin prochain.
Sacré caractère
En quelques mois, Patrice Evra s'est donc imposé comme un taulier de cette équipe comme l'a reconnu son entraineur : « Après des premiers mois d'adaptation, Patrice a su se mettre au service de l'équipe. C'est un joueur très intelligent qui a joué à l'étranger pendant longtemps en jouant un jeu différent. Il est train de réaliser une grande année. C'est un joueur très important avec une forte personnalité ». Un constat que partage son coéquipier en équipe de France, Loïc Rémy qui a affirmé avant le Mondial brésilien que « Patrice avait le rôle peut-être le plus important dans le groupe . Il a un rôle de grand frère. Il parle énormément. »
Au-delà de ses qualités de footballeur, c'est surtout le caractère de l'homme qui fait la force du joueur comme il aime le rappeler, à l'image de ses déclarations au Canal Football Club avant le match retour contre Monaco : « La Juve, c’est difficile, mais ça convient à ma mentalité. C’est incroyable, je ne me suis jamais entraîné comme ça de toute ma carrière. A Manchester United, c’était les vacances, mais tu gagnes. De belles vacances… Ici, c’est comme une bouteille de vin. Plus tu prends de l’âge et le goût devient meilleur ».
Et peu importe si son tempérament lui a aussi causé des misères. Il s'est notamment brouillé avec le public français qui le trouve souvent trop arrogant et pas assez performant avec les Bleus. La faute aussi au mondial 2010 où Evra a été présenté comme l'un des meneurs de la fronde de Knysna.
S'il assure passer outre, il ne manque jamais une occasion de piquer le foot français. « Vous savez, je ne suis pas savant mais Paris est tombé sur un gros morceau et Monaco sur une équipe expérimentée de la Juve. Mais je pense qu’en France, on aime bien être le pays du deuxième. Il va falloir franchir un palier, c’est-à-dire qu’il y a une autre mentalité à avoir. Il faut respecter l’adversaire mais sur le terrain mettre plus de folie et être conscient de ses forces », a-t-il déclaré après la qualification de la Juventus Turin pour les demi-finales de la Ligue des Champions.
Un dernier tour en Bleu
Sûr de lui, l'homme aux 65 sélections est en passe de réussir son pari, à savoir s'imposer en Italie, le pays dans lequel tout a réellement commencé pour Patrice Evra. Il avait déjà évolué sur la botte entre 1998 et 2000, d'abord à Marsala en Série C, puis à Monza en série B, avant de rejoindre Nice pour deux saisons et Monaco en 2002. Aujourd'hui, un autre défi l'attend : celui de disputer l'Euro 2016 en France. Ce serait sa cinquième compétition internationale consécutive. Malgré ses 33 ans, il fait toujours office de titulaire dans l'esprit de Didier Deschamps, le sélectionneur de l'équipe de France. Une position qui ne devrait pas évoluer au vue de son aventure italienne. Après s'être défait de la concurrence d'Asamaoah sur son côté gauche à Turin, il attend toujours un challenger capable de le déloger définitivement chez les Bleus.