Roberto Dinamite, un brumeux matin
C’est dans un brumeux matin que Carlos Roberto de Oliveira vient au monde. Le 13 avril 1954, dans un quartier de Rio de Janeiro, non loin du Pétropolis qui a vu naître Rafael, le Brésil fait naître celui qu’il n’appelle pas encore Roberto Dinamite. Sauf que, bien évidemment, le talent ne se cache pas. Dès qu’il est en âge de taper dans le cuir, à la fin des années 50, le jeune garçon impressionne. A la fois par son placement que par son sens du but et de la construction. Très vite, il fait partie des joueurs les plus recherchés pour les “torneios abertos“, les tournois ouverts. Ces compétitions, typiques de Rio, sont souvent le lieu de l’expression des jeunes talents. Et il n’est pas rare d’y voir tourner des recruteurs venus des plus grands clubs du Brésil.
Et cela ne déplaît d’ailleurs que peu aux jeunes joueurs qui viennent s’y produire ! En effet, bien souvent, les jeunes cherchent à se faire recruter par des clubs. Et à cette époque, cela l’est bien moins qu’aujourd’hui. Celui qui a acquis le surnom de “Duc de Caixas”, du nom de sa ville natale (Duque de Caixas), est l’objet d’épineux débats. Et en 1969, enfin, il quitte le cocon familial. C’est le CR Vasco de Gama, club qui engendrera d’ailleurs plus tard Juninho, qui récupère la pépite. Et qui va la couver avec des yeux de mère-poule. Car Flamengo, Botafogo et les Corinthians, tour à tour, vont tenter de récupérer le jeune buteur. Celui que l’on compare à Jairzinho fait les beaux jours des équipes de jeune, marquant dix puis treize buts lors des deux tournois juniors qu’il dispute. Cela n’est pas pour calmer les ardeurs des autres clubs !
Roberto Dinamite, une détonation
En 1971, enfin, à l’âge de 17 ans, Carlos Roberto de Oliveira fait ses débuts avec l’équipe première de Vasco de Gama. Et il ne les fait pas n’importe où. En effet, c’est au prestigieux Maracanã, le stade du football par excellence, qu’il commence en pro. Et ce soir de novembre, positionné à la pointe de l’attaque du Vasco, Roberto va prendre son surnom de “Dinamite” (dynamite en français). En effet, un journaliste du Jornal do Sport présent au match écrit dans son compte-rendu : “Vasco escala garoto-dinamite” (Vasco possède un garçon-dynamite). Et ils récidiveront à plusieurs reprises, par des manchettes comme “Le garçon-dynamite provoque une détonation au Maracanã”. Dès lors, il ne quittera plus son surnom. On a déjà vu pire comme nom !
Et son numéro dix sera associé à Vasco da Gama tout au fil de sa carrière. S’il ne passe pas l’intégralité de ses jeunes années sous le maillot du géant de la colline, il y restera quelques temps. Au point de devenir le meilleur buteur de l’histoire du club en championnat du Brésil (190 buts). Toutes compétitions confondues, il scorera à 711 reprises en 1140 apparitions, plus quelques unes à la toute fin de sa carrière dont on n’a pas le compte exact. Pas mal pour un joueur que de présenter cette feuille de stats. Le numéro dix, droitier, d’un mètre quatre-vingt-six, positionné à la pointe de l’attaque, est l’un des joyaux du football brésilien.
La dynamite du Brésil
Et forcément, ses bonnes performances ne laissent pas indifférent recruteurs comme sélectionneurs. D’abord, la sélection. Il la fréquente de 1975 à 1984. Au nom de Roberto Dinamite, différentes statistiques sont associées. Si l’on est sûr de ses trente-huit sélections et vingt buts en matchs officiels, lorsque qu’il s’agit d’autres matchs, le compte est plus difficile. Jérôme Bureau, dans son ouvrage de 2005 sur les joueurs ayant fait le football brésilien, avait compté six buts en matchs non-officiels. L’on peut rajouter une dizaine de sélections également. Plus cinq matchs et un buts lors de Jeux Olympiques. Toujours est-il que Roberto Dinamite fait partie des meilleurs buteurs que le Brésil ait compté. Grâce notamment à son titre de meilleur buteur de la Copa America 1983. Le triple ballon d’argent brésilien est décidément un garçon épatant.
Le principal problème, ce sont les recruteurs des clubs étrangers. Difficile de résister aux attaques de club comme le FC Barcelone. Le triple meilleur buteur du championnat carioca et double meilleur buteur du championnat du Brésil y signe en 1979. Il disputera huit matchs de Liga, pour deux buts. Toutes compétitions, cela sera dix-sept matchs et huit réalisations. Un total pas extraordinaire qui s’explique en partie par son mal du pays. Cela sera d’ailleurs sa seule expérience à l’étranger de sa carrière. En effet, il va revenir assez vite au pays, pour son club adoré et chéri, le Club Regatas Vasco da Gama. Car la fidélité est une valeur que connaît par cœur Roberto Dinamite.
Car son retour à Vasco de Gama n'est pas le fruit du hasard. En effet, durant son passage à Barcelone, il reçoit, comme tout footballeur en perte de vitesse, des offres de divers clubs. Parmi ceux intéressés par son profil, on retrouve le Flamengo. Et Roberto Dinamite aura alors cette phrase devenue célèbre : "Je ne suis revenu à Vasco de Gama que parce que le Flamengo le voulait". L'avant-centre ne voulait pas trahir le public qui l'avait révélé, qui l'avait porté des matchs durant, et dont il était quelque part devenu un enfant.
Pétard mouillé
La fin de la carrière de Roberto Dinamite est plus que compliquée. En effet, après un passage de cent-trente-quatre matchs au Vasco, pour quatre-vingt-neuf réalisations en championnat du Brésil, il quitte à nouveau le club pour le Portuguesa. Seize matchs et neuf buts plus tard, en 1990, il retourne à Vasco. Là aussi, cela sera très compliqué. Il ne marquera plus jusqu’à l’arrêt de sa carrière, en 1993. Quatorze matchs pour Campo Grande viendront interrompre son aventure à Vasco. Qu’il retrouve en 1993. Deux petites apparitions en championnat, le temps de faire ses adieux devant le seul public qui ne l’aie jamais sifflé le 24 mars. Si sa fin de carrière est compliquée, cela n’enlève rien à son statut de légende inébranlable du football à Vasco da Gama. Où, aujourd’hui encore, le club recherche un joueur pour être son successeur.
Il décide, à sa retraite, de faire de la politique. Sous la bannière du parti social-démocrate puis du mouvement démocratique, il deviendra député de Rio. Il gardera d’ailleurs ce titre pendant cinq mandats, le dernier ayant pris fin en 2015. Aujourd’hui, celui qui est redevenu Carlos Roberto de Oliveira, coule une retraite tout à fait paisible. Âgé de 63 ans, il ne combat plus dans les deux choses qui attirent le plus les foules et les velléités : le football et la politique. Le vainqueur de la Copa Rio Branco 1976 avec le Brésil n’a peut-être jamais remporté un mondial. Mais il reste un symbole de ce football brésilien qui aura fait dire à de nombreux commentateurs que les Anglais ont inventé le foot, et les brésiliens l’ont perfectionné.