L’entretien publié hier dans France Football prend tout de suite un sens un peu plus comique. Dans cet interview au bihebdomadaire, Pierre Dréossi déclare que son avenir est toujours à Rennes, et qu’il a toujours la confiance de l’actionnaire. « S’il n’avait pas confiance en moi, mon cas serait réglé en une minute, même pas en cinq », lâchait-il alors. L’article a été publié hier, mais on dirait que cela fait une éternité. Hier soir, Nicolas Carnec du quotidien Ouest-France avançait, sur Twitter, un départ possible de « Dr. Dré ». Ce matin, le site internet du club confirme le départ de Pierre Dréossi.

Un bilan pourtant positif

Dans cette même interview, le désormais ex-manager général du Stade Rennais s’était permis de tacler avec les deux pieds des membres de l’entourage du club, que Frédéric Antonetti avait surnommé « les forces obscures » en son temps. Parmi eux, Hubert Guidal, membre du conseil d’administration jusqu’en juillet 2012, et responsable des transferts avant l’arrivée de Dréossi au club, en 2002. Guidal n’a pas, semble-t-il, démérité ce démontage en règle : il est l’instigateur des plus gros flops de recrutement de l’histoire du Stade Rennais, claquant un sacré paquet d’oseille sur des joueurs qui devaient permettre au club de franchir un cap. 21 millions d’euros sur Severino Lucas et 12 millions sur Mario Turdo en 2000 : les deux attaquants marquent respectivement 11 et 3 buts dans leur période rennaise. « Ça n’était pas son argent, c’est peut-être pour ça, lâche Dréossi. Le cash-flow de l’entreprise en subit encore les conséquences. C’est lui et ses copains, que je pourrais nommer un par un, qui alimentent ces rumeurs (de son départ, ndlr). S’ils savaient ce que je pense d’eux, ils diraient davantage de mal de moi... » Sauf que pour une fois, ils avaient raison.

Le bilan de Pierre Dréossi reste évidemment bien meilleur que celui de Guidal, mais aussi globalement positif. Pour sa première saison, il enrôle certes Georgi Ivanov, Gabriel Loeschbor et Andres Fleurquin, trois gros flops, mais aussi Petr Cech et Alexander Frei, deux énormes réussites. Egalement à ranger au niveau des trouvailles du manager rennais : Kim Källström et ses copains de la filière suédoise (Isaksson, Edman, Hansson), Asamoah Gyan, Kader Mangane ou plus récemment Jean-Armel Kana-Biyik et Romain Alessandrini. Côté échecs, on a aussi de quoi faire : l’échange Olivier Monterrubio – Olivier Thomert, Ismaël Bangoura (son plus gros transfert, 11 M€), ou Razak Boukari par exemple (voir le résumé des mouvements sous son égide sur le site Rouge Mémoire). Cependant, la politique formatrice qu’il a soutenu est dans l’ensemble réussie.

Pierre Dréossi à Rennes, c’est aussi une saison et demie en tant qu’entraîneur-manager, à l’anglaise. La saison 2006-2007 est une des meilleures de l’histoire du club, le fameux but de Fauvergue à la dernière seconde du dernier match du championnat privant le club d’une historique troisième place aux dépens de Toulouse. Sa deuxième saison, après des débuts intéressants, se termine en décembre après une série de défaites, et il reprend son rôle de simple manager général.

Contesté en fin de règne

Depuis deux saisons, pourtant, « Dr. Dré » était contesté. Les supporters avaient comme l’impression que l’ancien joueur de Lille, Nice ou Cannes était dépassé par les événements, et symbolisait en partie la « loose » du club. Après la finale de la Coupe de la Ligue perdue contre Saint-Etienne le 20 avril dernier, le plus important des groupes de supporters, le Roazhon Celtic Kop (RCK) a ouvertement demandé le départ de Dréossi, à travers un communiqué que l’on peut toujours lire sur sa page Facebook. « Le bilan de ses dernières années est clairement régressif, mais surtout il concentre un pouvoir monocéphale à la tête du sportif, ce qui est dangereux car aucun contre-pouvoir ne lui est proposé dans ce domaine », écrivait alors le groupe, qui avait déclenché la grève des encouragements sur la fin de la saison, offrant au stade de la Route de Lorient une ambiance encore plus morne qu’à l’accoutumée.

Dréossi a répondu au RCK dans son interview d’hier à France Football. « Ces fans sont frustrés, je le suis aussi. Maintenant, quand on est supporter d’un club, il faut être humble comme je le suis. Je suis désolé, même si c’est dur à accepter, mais Rennes n’a pas le potentiel pour viser la Ligue des champions ». Cependant, les critiques formulées par le RCK n’ont pas de rapport avec jouer la C1 ou non, Pierre…

Son destin semble être réglé depuis un bon moment par la holding Kering, nouveau nom d’Artémis, propriété de François Pinault. Mais ça, ni Dréossi, ni le président Frédéric de Saint-Sernin, qui a soutenu le manager jusqu’au bout, n’étaient au courant. La preuve ? Les deux hommes ont mené le recrutement de Philippe Montanier seuls, l’actionnaire n’ayant eu qu’un échange téléphonique avec le nouvel entraîneur du Stade Rennais. Le recrutement de Sylvain Armand n’a de plus pas été effectué par quelqu’un d’autre que Dréossi, en collaboration avec Montanier. Lors de l’entretien annuel pour définir le futur budget du club hier soir, François-Henri Pinault a fait part de son intention de modifier l’organigramme du club.

Qui pour lui succéder ?

Le poste de manager général n’existe désormais plus. Frédéric de Saint-Sernin devient président-directeur général du club, récupérant certaines prérogatives de Dréossi. Un directeur sportif sera nommé dans les prochains jours. Quelques noms circulent : Ouest-France évoque Damien Comolli, ancien directeur sportif de Saint-Etienne et Liverpool, Jean-Luc Buisine de Monaco, et Eric Carrière, membre du conseil de surveillance de Dijon. Quant à l’avenir de Pierre Dréossi, aucune information n’a été communiquée. Toutefois, contacté par l’Equipe de France en 2010, il ne devrait pas avoir trop de mal à retrouver un travail.

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