S’il a été blessé quasiment l’intégralité de la saison qui vient d’être coupée par la pandémie de Coronavirus, Stephen Curry reste l’un des étendards de la NBA. Triple champion, double MVP, multiple All-Star, le fils d’Eddie Curry a su dépasser toutes les attentes pour devenir un futur Hall Of Famer évident. Un destin incroyable qui n’était pas chose évidente au vu de son gabarit de freluquet. Pourtant, grâce à sa détermination et un shoot exceptionnel, il a réussi à repousser ses limites, et ce dès le plus jeune âge. Entre 2006 et 2009, il va ainsi réaliser un cursus universitaire de grande qualité, magnifié par une campagne de March Madness 2008 entrée dans la légende.
Un tir déjà propre et soyeux
Sous le maillot des Wildcats de Davidson, il entame la campagne 2007-2008 avec déjà une année de rookie solide derrière lui. Elu meilleur débutant de sa Conférence la saison précédente et deuxième meilleur marqueur rookie du pays derrière un certain Kevin Durant avec plus de 21 points par match, son niveau de jeu est déjà très intéressant. Mais Davidson n’étant pas un programme aussi réputé que ceux de Duke, Kansas, UCLA ou Gonzaga, il se fait éliminer dès le premier match du tournoi final. Un échec prometteur sur lequel il capitalise la saison suivante.
Encore une fois, il domine sa conférence en augmentant sensiblement sa moyenne pour tourner à 26 points par match. Portés par leur jeune arrière incandescent, les Wildcats se qualifient une nouvelle fois pour le tournoi final du Midwest. Non tête de série, l’équipe de Davidson doit donc se taper un gros morceau d’entrée, l’université de Gonzaga de Jeremy Pargo et Robert Sacre. Coéquipier du shooteur fou à l’époque, Jason Richards, s’était souvenu de cette époque, et de ce match face à Gonzaga, pour le site de la NCAA : « Ce fut le match de la révélation. Le monde du basket savait à quel point Stephen était bon, mais cette rencontre l’a mis sur la carte, parce que tout le monde regarde le tournoi NCAA. Nous sommes devenus la belle histoire de cette année avec Steph qui était notre gars, notre leader. ». Effectivement, le natif d’Akron décide de mettre les petits plats dans les grands.
40 points pour mettre fin à 39 ans de disette !
Alors qu’il vient tout juste de fêter ses 20 ans, il est encore au gamin au jeu bien plus limité que celui qu’on lui connait actuellement. Son jeu de passe est loin d’être développé (moins de 3 caviars par match en moyenne), et il ne dispose pas encore vraiment d’un footwork lui permettant de créer son propre tir. En revanche, sa capacité à mettre des filoches en déclenchant à une vitesse hallucinante est bien là. Grâce à sa vivacité, il parvient déjà à faire preuve d’un jeu sans ballon de qualité pour se créer de l’espace, et en catch-and-shoot, il est un cauchemar pour ses vis-à-vis. C’est ainsi qu’il va réussir à enchaîner les filoches. Ce n’est pas l’équipe de Gonzaga qui dira le contraire. Ultra favorite face à la petite fac de Davidson qui n’a plus remporté un match dans le tournoi final depuis des années, elle va subir la foudre venant du poignet droit de Curry.
Pourtant, tout au long de la partie, les favoris ont l’avantage, menant de plus de 10 points à la mi-temps. Auteur de 10 points dans le premier acte, Stephen Curry fait un bon match mais ne semble pas être en capacité de porter son équipe pour créer la sensation. Que nenni ! En seconde période, le désormais double MVP de NBA se met en route et martyrise la défense adverse sans cesse. Entre shoots en première intentions, pénétrations entraînant des plus one, et tirs à longue distance dès que le moindre espace se présente, il réalise une mixtape phénoménale durant laquelle il plante 30 points en moins de 20 minutes ! Le coach Mark Few essaye une défense un peu plus physique, ou des prises à deux mais rie n’y fait. Sur un nuage, le petit génie trouve toujours une solution pour permettre à son équipe d’aller chercher la victoire en plantant 40 points, soit quasiment…la moitié de son équipe (Victoire 82-76) ! Après 39 années de disette, Davidson gagne de nouveau un match dans le tournoi NCAA. Et ce n’est pas fini.
La naissance de la torche humaine
Au tour suivant, c’est encore un gros morceau qui se présente : Georgetown, tête de série numéro 2 du tournoi. Avec dans ses rangs Patrick Ewing Jr et Roy Hibbert entre autres, les Hoyas possèdent l’une des meilleures défenses du pays avec seulement 57 points concédés par match. Et cela se ressent. Etouffé, Davidson n’existe pas en première mi-temps, et rejoint les vestiaires avec un déficit de 11 points. L’écart va même monter à +17 alors qu’il reste 18 minutes à jouer (46-29). Les Wildcats sont au fond du trou, et Stephen Curry encore plus. Parfaitement gêné par la solide défense de ses adversaires, il n’arrive pas à se mettre en rythme, et n’inscrit que 5 points, à 2/12 au tir à ce moment de la partie. Mais comme tout le monde le sait, chef Curry peut à tout moment se transformer en torche humaine pour faire brûler n’importe quelle défense.
Alors qu’on le pense en train de s’effondrer, il va une nouvelle fois sortir une deuxième mi-temps de grand malade. Il retrouve ses sensations et enchaîne un 4/7 au tir dans un run incroyable de son équipe (16-2) pour recoller au score, tout en faisant les efforts défensifs nécessaires. Alors que le match est intense et serré, il va une nouvelle fois débloquer la situation en enchaînant une pénétration et un shoot à 3 points pour permettre aux siens de faire la différence, avant d’assurer avec un 5/6 sur la ligne des lancers pour assurer la victoire, 74-70. Avec 30 points au compteur, dont 25 dans le second acte, le tout accompagné de 5 passes et 3 interceptions, Curry mène une nouvelle fois ses inattendus Wildcats à la victoire !
Le Kansas invincible de Mario Chalmers en briseur de rêves
Place alors à la demi-finale de l’ACC Conference (ou Sweet Sixteen pour les passionnés de NCAA), où le Wisconsin de Jon Leuer et Greg Stiesma se présente avec tout simplement la meilleure défense du pays (53 points encaissés par match). La marche est trop haute ? Stephen Curry va être enfin stoppé ? Et bien une nouvelle fois, la réponse est un grand non. Si les deux équipes sont à égalité à la mi-temps, les Wildcats vont défoncer leur adversaire en deuxième période, leur infligeant un 37-20 pour finalement l’emporter sur le score sans appel de 73-56. La meilleure défense du pays fait alors une connaissance rude avec un Curry insolent, auteur de 33 points, à 50% au tir, dont un joli 5/11 derrière l’arc. Déjà en folie après avoir passée le premier tour, l’université de Gonzaga se met alors à rêver d’une qualification historique pour le Final Four, leur meilleur résultat étant une place une place en Elite Eight, chose qui était arrivée seulement en 1968 et 1969. Et désormais en 2008.
Pour rêver, il faut alors gravir un monstre sacré du circuit universitaire : Kansas. Les Jayhawks sont toujours difficiles à manœuvrer. Coachés par Billy Self déjà à l’époque, et menés par le futurs NBAers que sont Mario Chalmers, Cole Aldrich, Brandon Rush, Darrell Arthur ou Sacha Kaun, ils marchent sur le tournoi. Que ce soit Portland State, UNLV ou Villanova, tous ont été expédiés par au moins 15 points d’écart. Toutes les belles histoires ont une fin, et les Jayhawks vont tenir le rôle des briseurs de rêves, non sans souffrance. Dans cette partie, jamais l’écart ne dépasse les cinq points !
Davidson tient tête à son adversaire, mais pour une fois, Stephen Curry n’est pas dans un grand jour et cela se paye cash. S’il inscrit tout de même 25 points, il prend près de la moitié des shoots de son équipe (9/25 pour lui), et se montre surtout trop maladroit et gourmand derrière la ligne avec un 4/16. S’il en met un déterminant dans la dernière minute, il n’aura pas la balle de match. Pris à deux, il ne peut pas se mettre en position et c’est finalement Jason Richards qui gâche la dernière munition. Davidson s’incline 59-57 et frôle un exploit absolument historique.
Une dernière saison universitaire avant de faire le grand saut
A la fin de la rencontre, Stephen Curry est dévasté : « Ca fait très mal d’aller si loin, d’être si près du Final Four ». Malgré tout, sa campagne lors du tournoi a permis à Davidson de devenir la belle histoire de cette campagne, portée par un leader absolument fabuleux. Avant son match face à Kansas, le futur joueur des Warriors a ainsi tourné à 34,3 points par matchs, le tout à plus de 50% au tir, dont 52% à 3 points ! Des statistiques exceptionnelles qui lui ont permis d’obtenir le respect de tout le circuit, et également de décrocher le record du nombre de paniers derrière l’arc inscrits sur une seule campagne dans l’histoire de la NCAA.
Alors qu’il pouvait d’ores et déjà légitimement se présenter à la Draft NBA, il passe finalement une dernière année en université lors de laquelle il gonfle une nouvelles fois ses statistiques (28,9 pts / 45% au tir / 5,6 passes / 2,5 interceptions), et prend la position de meneur de jeu. Les résultats ne sont pas au rendez-vous, et il se fait éliminer avant même le début de la March Madness. Mais meilleur marqueur du circuit, et désormais meilleur marqueur de l’histoire de l’Université de Davidson, sa côte est au plus haut. Il se présente finalement en 2009 et est sélectionné au 7e rang par les Warriors de Golden State. La suite, on la connaît tous…