Dès le début de la pandémie du Covid-19 et des premières mesures prises par le gouvernement à la mi-mars afin de tenter de contrôler la pandémie que nous subissons, nous savions que les retombées de cette mise à l’arrêt partielle du pays allaient être difficiles à surmonter. Dans tous les secteurs d’activité, le contrecoup est terrible et il faudra du temps pour envisager un retour à la normale. Malgré cette situation exceptionnelle, les bons côtés de l’être humain sont ressortis avec notamment une énorme solidarité envers les personnels soignants ou encore pour la production de masques. Comme toujours, les mauvais côtés sont également présents à l’image des rues parisiennes bondées les premiers weekends ou les attitudes déplorables de certains cas isolés.
De la cour de l’école à l’assemblée de la ligue, il n’y a qu’un pas
Dans le monde du football qui a toujours eu une image à préserver en raison du modèle qu’il est sensé donner, il est en revanche difficile de trouver la moindre once de positif. Si l’on excepte les gestes financiers et humains qu’il faut bien évidemment souligner pour participer au combat contre la pandémie, et que l’on se concentre uniquement sur ceux qui ont le pouvoir de décision sur le football français (membres de la ligue, présidents de club), on atteint le paroxysme du ridicule. Alors qu’une certaine forme de retenue et de bon sens devrait être de mise pendant cette période, on assiste plutôt à une guerre de tranchées entre des présidents qui défendent chacun leur petit steak de leur côté.
Depuis plus d’un mois, on se retrouve ainsi plongé dans une cour d’école anarchique avec des clans différents qui ne respectent aucune directive d’une ligue qui s’apparente plus à un professeur incompétent et dépassé qu’à un véritable chef capable de contrôler ses ouailles. Chaque semaine, on assiste au même cirque avec certains présidents qui s’emparent des médias pour défendre unilatéralement leur chapelle (Coucou Bernard Caïazzo ou Gérard Lopez notamment) et en se mettant en avant de manière théâtrale, voire dérangeante, quand on sait la situation désastreuse du football français sur le plan financier. Que dire également de l’échange entre Aulas et Eyraud où on en est venus à faire pleuvoir les insultes diverses et variées…
Nicollin, le contre-exemple de la raison au milieu de requins déconnectés de la réalité
La situation a donc atteint son paroxysme ce vendredi avec le verdict définitif de la LFP concernant le classement final de la Ligue 1. Déjà, l’annonce d’Edouard Philippe avait jeté un énorme froid sur tous les grands bonnets de la Ligue 1 qui commençaient à faire des plans sur la comète en préparant une reprise du championnat dès le mois de juin. Oui les gars, malgré tout l’amour que l’on porte au football, ce n’est pas lui qui est décisionnaire, ni prioritaire, et régit les lois de la nation… Ainsi, une nouvelle fois, chacun y est allé de sa proposition personnelle pour essayer de terminer le championnat, notamment un Jean-Michel Aulas en sueur, et sa proposition de Play-Offs. (L’influence de Tony Parker déjà, peut-être…). Le président lyonnais savait sans doute déjà au fond de lui-même que la solution la plus évidente serait celle qui a été finalement retenue par la LFP, et qui laisse son club orphelin de Coupe d’Europe : prendre en compte la dernière journée disputée (28è), et utiliser un quotient afin de ne pas mettre de côté le seul match de cette 28è journée n’ayant pas eu le temps d’être disputé (PSG-Strasbourg).
Evidemment, les réactions n’ont pas tardé à se faire entendre. En premier lieu, ce même Aulas qui va entamer une procédure judiciaire afin de récupérer quelques millions. Difficile de lui en vouloir étant donné que lui et son club peuvent légitimement se sentir lésés étant donné les écarts infimes existants pour l’attribution des dernières places européennes. Mais dans cette situation particulière, le mieux ne serait-il pas de faire preuve de sagesse et de compréhension ? Le président lyonnais est même allé jusqu'à pointer du doigt l'OGC Nice dans une démonstration totalement puérile... Dans la même situation que JMA et l’OL, le président de Montpellier (8è) Laurent Nicollin a lui fait preuve ‘une attitude respectable en acceptant la décision de la ligue et en ne cherchant pas à remettre en cause une décision qui était difficile à prendre, mais qui devait être décrétée. Et que dire d’Olivier Sadran, totalement largué avec son TFC qui se dirigeait de toute évidence droit en Ligue 2, et se permet également de vouloir entamer des procédures judiciaires…
Comme bien souvent dans le football, les requins se permettent de pointer le museau hors de l’eau en toute circonstance, faisant passer la décence et la raison pour des concepts dépassés alors que ce sont ceux qui doivent être portés en étendard en temps de crise. Au lieu de se regarder droit dans une glace et d’assumer les erreurs de gestion qui sont nombreuses, chacun s’accroche à la moindre petite chose qui peut sauver ses fesses. Et malheureusement, on en est seulement au début.
De nombreux clubs déjà pris à la gorge financièrement qui voient l’étau se resserrer
Suite à l’annonce de la ligue, Canal + et BeinSport ont de leur côté annulé les derniers versements qu’ils devaient à la ligue pour les droits de diffusion. Ce sont donc 278 millions qui vont être enlevés des mains des clubs. En soit, cela est compréhensible puisque les deux groupes n’auront pas le produit pour lequel ils auraient dû payer. Cependant, les abonnés qui payent des sommes conséquentes pour avoir accès au football n’ont pas eu le moindre signe de la part des diffuseurs concernant une baisse de l’abonnement qui serait logique puisqu’eux aussi sont privés du produit pour lequel ils ont consenti à sortir l’argent du porte-monnaie. Mais bizarrement, dans ce cas précis, personne ne trouve rien à y redire dans les plus hautes sphères des médias. Encore une fois, c’est chacun pour sa gueule dès qu’il y a de la thune à préserver.
Maintenant, on va attendre de voir ce que la ligue va décider de faire pour combler l’énorme manque à gagner que vont subir les clubs. Déjà dans une situation financière inquiétante pour la plupart, ils vont être encore plus affaiblis. Et l’hypothèse étudiée de faire un prêt auprès d’un groupe financier le mois dernier, avec des négociations menées par un consortium au sein duquel Gérard Lopez est en tête de gondole (La faillite de Lotus en F1, c’est lui, et le LOSC est aujourd’hui dans l’obligation de faire le maximum de bénéfices via le marché des transferts pour rembourser le prêt qu’il a contracté au sein du fonds Elliott Management afin de racheter le club), risque de rapidement revenir. Déjà sous assistance respiratoire avant la crise économique en raison de la gestion de nababs réalisée au sein de nombreux clubs, la suite s’annonce encore plus sombre pour notre chère Ligue 1.
Que ce soit à Bordeaux où le fonds d’investissement King Street pourrait tuer le club s’il désire limiter la casse, à Marseille où le malheureux Franck McCourt doit se plumer année après année pour faire survivre le club à l’incompétence de Jacques-Henri Eyraud, à Saint-Etienne où la gestion bicéphale de Caïazzo et Romeyer est en train de flinguer progressivement un club qui avait une gestion convenable il y a encore quelques temps, la situation est déjà loin d’être reluisante. Tous ces exemples sont malheureusement loin d’être exhaustifs… L’avenir s’annonce donc encore plus sombre, et au vu du bordel monstre qui règne au sein de la ligue, difficile d’imaginer quelqu’un capable de vraiment prendre le contrôle pour siffler la fin de la récréation, et remettre tout le monde dans le droit chemin. Le « football circus » cher à Stéphane Guy n’a jamais aussi bien porté son nom. C’est d’une tristesse absolue, mais c’est bien souvent en période de crise que les visages se dévoilent.